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Patrick Pudduy présente dans les Echos les différents leviers utilisés par les constructeurs automobiles pour réduire les émissions de CO2

By 12 janvier 2015 No Comments

Patrick Pudduy présente dans les Echos les différents leviers utilisés par les constructeurs automobiles pour réduire les émissions de CO2

12 janvier 2015 | Les Echos

Afin de réduire l’impact environnemental de la circulation automobile – les voitures particulières génèrent aujourd’hui environ 12 % des émissions de CO2 –, l’Europe et les États-Unis durcissent progressivement la réglementation en matière de niveau d’émission autorisé par véhicule. 

Ainsi, la Commission européenne a fixé pour 2015 une valeur limite autour de 130 g de CO2 par véhicule par kilomètre parcouru, la valeur exacte dépendant du poids du véhicule. En 2020, cette limite passera à 95 g/km. En cas de non-respect de cette réglementation, ce sont les constructeurs qui devront s’acquitter d’une pénalité financière : à partir de 2019, tout gramme supplémentaire au-dessus de la limite leur coûtera 95 € par véhicule.

Ainsi, à supposer que ceux-ci ne fassent rien pour réduire les émissions de leurs véhicules actuels, PSA et Renault devraient payer respectivement 3,6 milliards d’euros et 3 milliards d’euros d’amende chaque année à partir de 2020 (sur la base de leur niveau de vente actuel en Europe) : la réduction du niveau d’émission de CO2 devient donc un sujet hautement prioritaire.

Différents leviers pour réduire les émissions des CO2

Plusieurs moyens peuvent être utilisés pour réduire les émissions de CO2 des véhicules avec un moteur 100% thermique :

• Le downsizing du moteur : les constructeurs ont de plus en plus tendance à “compacter” leurs moteurs : en utilisant des systèmes de suralimentation (turbo compression par exemple), le moteur peut délivrer la même puissance avec une cylindrée plus petite. Cette évolution permet de réduire d’environ 10 à 15 g/km les émissions du véhicule. Dans ce domaine, PSA et Renault ont développé une expertise importante.

• L’amélioration de la chaine de traction : il s’agit de réduire les pertes d’énergie entre le moteur et les roues en optimisant le système de transmission de puissance : le gain généré est d’environ 13 g/km.

• L’amélioration de l’aérodynamisme et la réduction de la résistance au roulement permettent de gagner environ 4 g/km.

• La réduction du poids du véhicule : une réduction de 110 kg du poids d’un véhicule permet de gagner 10 g/km d’émission de CO2. Une des stratégies pour réduire le poids d’un véhicule consiste à employer des matériaux plus légers que l’acier qui constitue aujourd’hui environ 55 % du poids d’un véhicule.

La réduction de la taille des pièces grâce aux aciers à très haute résistance

La meilleure option consiste à utiliser des alliages d’acier à très haute résistance (acier au bore par exemple) qui permettent de réduire l’épaisseur globale des pièces tout en gardant les mêmes caractéristiques mécaniques. Et en complément le soudage de petites pièces à épaisseurs variables pour former de plus grands éléments de structure ou de forme pour la caisse en blanc.

Outre le gain de poids grâce à un positionnement très spécifique des meilleures épaisseurs, cette structure multiforme permet aussi d’optimiser les performances du châssis lors des crash-tests.

L’aluminium comme alternative sur des pièces critiques

L’aluminium constitue également une alternative à l’acier : la pénétration de ce matériau est déjà forte sur certaines pièces (blocs-moteurs) ou en forte progression sur d’autres (triangles et pivots de liaison au sol, roues) même si cela concerne aujourd’hui majoritairement les véhicules haut de gamme en raison du prix notablement plus élevé de l’aluminium par rapport à l’acier.

L’aluminium commence depuis peu à être également utilisé pour des pièces de structure du véhicule : c’est le cas par exemple du SUV Ford F150 dont la majorité de la caisse en blanc est en aluminium. La France possède un savoir-faire de pointe dans ce domaine avec des groupes comme Constellium ou Sifcor.

Le développement de la fibre de carbone à bas coûts

La fibre de carbone apparait aussi comme une solution d’avenir pour alléger les véhicules : il s’agit d’un matériau composite qui intègre une résine, des additifs et de la fibre – en tissu, en fibre longue ou en fibre coupée. Celle-ci permettrait un gain de poids de 40 % à 50 % par rapport à l’acier à iso-performance.

En revanche, ce composite – issu de l’industrie aéronautique – reste très confidentiel pour l’instant en raison de son prix, pour l’instant beaucoup plus élevé que celui de l’acier, du fait du coût des résines utilisées et surtout du coût de mise en forme du matériau.

Le seul exemple d’utilisation de la fibre de carbone à grande échelle sur un véhicule est le modèle BMW i3 dont la carrosserie est entièrement en fibre de carbone. De nouveaux procédés de mise en forme du matériau composite à partir de tissu ou de fibres longues sont actuellement en phase de test pour diminuer son coût global et le rendre plus compétitif.

La mise en place récente de la filière française fibre de carbone FORCE avec un partenariat entre des acteurs de la chimie comme Arkema ou Kermel et des équipementiers automobiles comme Faurecia ou Plastic Omnium permettra de mutualiser de lourds investissements nécessaires (plusieurs centaines de M€, dont 100 M€ pour la phase R&D) et d’accélérer le passage à une production industrielle de la fibre de carbone à bas coûts.

Étant donné l’importance croissante que revêt la réduction des émissions de CO2, la France a ici une belle carte à jouer pour développer et structurer son expertise sur les différents segments qu’elle maîtrise – downsizing des moteurs, acier à très haute résistance, aluminium et fibre de carbone – et se positionner comme un des leaders mondiaux dans ce domaine grâce à ses champions.