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Chronique de Patrick Pudduy dans Challenges : “Il manque à la filière française de la forge automobile un champion national suffisamment puissant pour se développer à l’international et faire jeu égal avec les grands acteurs mondiaux”

By 28 octobre 2014 No Comments

Chronique de Patrick Pudduy dans Challenges : “Il manque à la filière française de la forge automobile un champion national suffisamment puissant pour se développer à l’international et faire jeu égal avec les grands acteurs mondiaux”

28 octobre 2014 | Challenges

A l’échelle mondiale, le marché des pièces forgées pour automobile représentait 15,4 milliards d’euros en 2013. Il est fort intéressant de noter que ce marché croit plus rapidement que celui de l’automobile dans son ensemble: 5,8% par an contre 3,8%.

Pourquoi la forge croit plus vite que l’auto

Plusieurs raisons expliquent cette différence. Technologiques tout d’abord, à travers deux importantes évolutions apportées aux véhicules: le “downsizing” des moteurs et l’utilisation croissante de l’aluminium. Les constructeurs automobiles cherchent à réduire le poids de leurs véhicules, notamment pour réduire leur consommation de carburant et leur émission de C0­2Cette réduction de poids passe en particulier par une réduction de la taille des moteurs. La tendance est ainsi de développer des moteurs qui fournissent la même puissance pour une cylindrée inférieure: la puissance spécifique augmente générant ainsi de plus grosses contraintes dans le moteur. Ce phénomène conduit à la substitution des pièces en fonte par des pièces forgées, plus résistantes.

Toujours dans l’optique de réduction du poids des voitures, les constructeurs remplacent de plus en plus l’acier par de l’aluminium. Pour les pièces soumises à de forte contraintes (exemple: liaison entre le châssis et les roues), la forge est le seul procédé qui permet d’assurer une résistance suffisante à ces pièces.

Des raisons plus techniques ensuite, liées aux évolutions des procédés de fabrication notamment. Le développement de nouvelles techniques de forge (“near-net shape”) permet en effet de produire en forge des pièces qui autrefois ne pouvaient être fabriquées qu’en usinage. La forge est plus compétitive que l’usinage car elle permet de réduire fortement les pertes de matières premières. C’est donc ce nouveau procédé qui tend à s’imposer au fur et à mesure du renouvellement des capacités de production. Cette substitution de l’usinage par la forge est notamment en cours pour la fabrication de pignons de boites de vitesse.

Ainsi, alors que les ventes de voitures ne connaîtront qu’une croissance moyenne de 1,5% par an entre 2014 et 2017 en Europe de l’Ouest, le marché de la forge augmentera lui de presque du double sur la même zone.

Les acteurs français en retard

Néanmoins, les zones de plus forte croissance pour les pièces auto forgées sont ailleurs: c’est la Chine (8,8% par an), l’Asie du Sud (7,5%), l’Europe de l’Est (7,0%) et l’Amérique du Nord (4,3%) qui sont aujourd’hui les relais de croissance.

Les pièces forgées n’étant pas facilement transportables sur de longues distances, leur valeur marchande par rapport au poids étant généralement trop faible, il est indispensable de développer des capacités de production locales pour parvenir à se développer commercialement sur un marché.

Les groupes de forge allemands ont appliqué très tôt cette stratégie de développement: Hirschvogel a ainsi débuté son expansion à l’international dès 1988 avec la création d’un site de production aux Etats-Unis. Ce développement s’accélère ensuite avec la création d’une Joint-Venture au Brésil en 1999, en Chine en 2001, en Inde en 2008 et en Pologne en 2009. Dans quasiment tous les cas, Hirschvogel a rapidement racheté les parts de son partenaire local dans l’ensemble des joint-ventures. Cette stratégie gagnante a permis au groupe de générer une (enviable) croissance moyenne de 7,9% par an entre 2005 et 2013.

En France, les principaux groupes de forge automobile n’ont pas ou peu initié ce développement hors d’Europe de l’Ouest. Quelques sites de production ont été installés en Asie ou en Amérique du Nord mais les filiales locales ne génèrent aujourd’hui au maximum que quelques millions d’euros de chiffre d’affaires, loin derrière les 40 millions d’euros de chiffre d’affaires générés par les filiales de Hirschvogel en Chine et au Brésil.

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